Dans l’industrie musicale, une rĂ©alitĂ© souvent nĂ©gligĂ©e vient entraver la carriĂšre de nombreux artistes talentueux. Ce constat, largement partagĂ© par celles et ceux qui, comme moi, ont Ă©voluĂ© dans ce milieu, rĂ©vĂšle une vĂ©ritĂ© simple : l’importance mĂ©connue des connaissances juridiques et administratives dans le succĂšs d’une carriĂšre musicale.
L’Erreur Monumentale des Artistes : Ignorer le Volet Juridique de la Musique
AprĂšs quinze annĂ©es d’expĂ©rience dans l’industrie musicale, j’ai observĂ© un phĂ©nomĂšne rĂ©current et troublant (dont j’ai Ă©tĂ© moi-mĂȘme Ă la fois la “victime” et le principal instigateur) : la majoritĂ© des artistes avec lesquels je suis amenĂ© Ă travailler, qu’ils soient chanteurs, musiciens ou producteurs de musique, consacrent des annĂ©es Ă perfectionner leur(s) art(s). Ils investissent temps, passion et ressources dans l’apprentissage du chant, du jeu d’un instrument ou la maitrise de la MAO. Mais ils rechignent, comme je l’ai fait longtemps, Ă prendre quelques heures pour comprendre les bases de tout ce que le fait de travailler dans la musique en tant qu’artiste va forcĂ©ment impliquer.
Je croise encore beaucoup trop d’artistes qui ne connaissent pas du tout la diffĂ©rence entre un Ă©diteur, un producteur de musique, un producteur de disques et confondent droits d’auteur, royalties, droits voisins, etc.
Au moment de signer des contrats, des feuilles de sĂ©ances et autres, ils vont se retrouver comme une poule devant une brosse Ă dent, embrouillĂ©s par la floppĂ©e d’acronymes, derriĂšre lesquels se cachent, en plus, des concepts trĂšs simples : DEP, DRM, ISWC, ISRC, SACEM, SCPP, SPPF, ADAMI, etc. Une Ă deux phrases par sigle et c’est limpide pour tout le monde une fois qu’on a cassĂ© ce rĂ©flexe de “je n’y comprendrai jamais rien, ce n’est pas pour moi”.
Cette lacune peut avoir des consĂ©quences dĂ©sastreuses sur leur carriĂšre. Sans une comprĂ©hension de base de tout ces cadres juridiques et administratifs, ou de la maniĂšre dont les revenus sont gĂ©nĂ©rĂ©s et distribuĂ©s dans l’industrie, les artistes se retrouvent souvent exploitĂ©s, leurs Ćuvres utilisĂ©es sans compensation Ă©quitable, ou encore pire, perdent le contrĂŽle de leurs propres crĂ©ations.
Les Fondements OubliĂ©s : Ăditions, Production et Droits Voisins
L’Ă©dition musicale et la production sont deux piliers de l’industrie, chacun avec son rĂŽle spĂ©cifique (simplifiĂ© et bien sĂ©parĂ©s pour la comprĂ©hension des mĂ©canismes de base, Ă©videmment).
- L’Ă©diteur gĂšre les droits d’auteur liĂ©s Ă l’Ćuvre de l’esprit et s’assure que les compositeurs et les paroliers soient justement rĂ©munĂ©rĂ©s pour l’utilisation de leurs Ćuvres, quels que soient les supports ou les moyens de diffusion. Il est le relais entre l’artiste et la Sacem et essaye de faire produire ou diffuser les Ćuvres qu’il gĂšre.
- La production, quant Ă elle, concerne le processus de fixation d’une Ćuvre, elle finance son enregistrement en payant les interprĂštes, musiciens, studios et ingĂ©s son jusqu’Ă la finalisation, le master, et Ă sa mise sur le marchĂ©. Elle est rĂ©munĂ©rĂ©e en droits voisins.
ConnaĂźtre la distinction entre ces deux domaines est essentiel pour naviguer avec succĂšs dans l’industrie.
Les droits voisins sont un autre concept mal compris : ils protĂšgent les performances des artistes interprĂštes (interprĂštes principaux compris, mĂȘme si ils ou elles sont dĂ©jĂ en auteur/trice, compositeur/trice ou les deux, peu importe), musiciens et l’investissement des producteurs de phonogrammes. Ils sont rattachĂ©s Ă l’ISRC, l’identifiant unique et international de l’Ćuvre.
Une Solution : L’Ăducation et l’Empowerment des Artistes
Il est impératif à mon sens de démystifier ces concepts juridiques et administratifs.
Des artistes qui savent exactement ce qu’ils et elles signent sont plus serein.e.s, plus fort.e.s et savent immĂ©diatement quand quelqu’un vient leur raconter n’importe quoi.
C’est donc aussi se prĂ©munir et prĂ©munir les artistes de ce qui semble ĂȘtre, Ă mon avis et avec 25 ans d’expĂ©rience, une constante dans les entourages : des gens qui manifestement ne connaissent rien aux fonctionnements de l’industrie musicale mais cherchent Ă se donner de l’importance, peuvent faire douter sĂ©vĂšrement un.e artiste par leur bĂȘtise et incompĂ©tence.
Exemple dĂ©jĂ entendu : “J’ai que 25% en phono alors que j’ai Ă©crit tout le texte, c’est pas normal !”
L’artiste qui connait et comprend son contrat d’Ă©dition aurait pu Ă©valuer immĂ©diatement la pertinence de son interlocuteur/trice et passer Ă autre chose.
“des gens qui manifestement ne connaissent rien aux fonctionnements de lâindustrie musicale (…) peuvent faire douter sĂ©vĂšrement un.e artiste”